Vie du coq Théo

La vie de Théo, grand coq Orpington argenté, maître du poulailler

Bonne nuit, les fifilles ! Bonne nuit Théo !

Tous les soirs, je m'endors paisiblement à l'entrée du dortoir, après le passage de notre maîtresse qui vient vérifier que tout va bien, couche Koala, la petite Hollandaise huppée, sur son perchoir, et nous souhaite bonne nuit. J'ai bien mérité le repos car je suis un grand coq, maître du poulailler, et j'ai d'importantes responsabilités. 

Je n'ai pas encore deux ans, mais je considère que ma vie de coq a été assez riche. Puisque Graciane a accepté de tenir le clavier pour le journal de Liserette, ma favorite, elle peut bien aussi m'aider à écrire mes mémoires.

Certains lecteurs doivent se gausser : pour écrire des mémoires, encore faudrait-il avoir de la mémoire !Justement, je me souviens fort bien de ma vie, y compris de mes tous premiers mois dans un petit élevage amateur d'un village de campagne.

Mes premiers mois

Je suis né à Commeny, petit village du Val d'Oise, au milieu d'un petit élevage amateur de poules Orpington. C'était bien, je me baladais dans le jardin avec mes frères et soeurs de couvée et notre petite bande vivait sa petite vie tranquille.

Malheureusement, je suis né fin février 2013, un peu tôt dans la saison. J'étais loin d'être le plus costaud. Je savais bien que j'étais un garçon, mais la plupart des poules étaient plus développées que moi, qui avait bien du mal à m'emplumer.

A trois mois, la situation a changé. Certains de nos frères et soeurs sont partis, emportés par des humains qui, parait-il, les ont achetés. J'ai commencé à m'inquiéter quand notre maître, un gars sympa, s'est interrogé tout haut devant moi sur la possibilité de me vendre comme une poule. J'ai failli me vexer, mais une de mes soeurs de couvée m'a expliqué que c'était ma seule chance de survie. Elle m'a expliqué que personne ne veut de coq, surtout de coq "mal poussé". Dure prise de conscience ! 

Et un jour, courant juin, notre maître est arrivé en se frottant les mains et nous a enfermés, une de mes soeurs et moi dans le clapier des poussins en disant : ça y est, je crois que je vous ai placés !

J'ai été vendu pour une poule !

Placés ? Que voulait-il dire par là ?

J'ai compris quand deux humaines sont venues et que, me sortant du clapier, le maître m'a mis dans les bras de la plus vieille. Totalement gâteuse, la vieille, mais gentille, ça oui ! Non seulement elle m'a pris pour une poulette, mais en plus elle m'a trouvée belle ! J'ai craqué, je lui ai fait mes yeux de velours.

Ma soeur, elle, était plus méfiante, mais elle a été fourrée dans un carton dans lequelle je l'ai rejointe au bout d'un temps.

Moi, j'étais bien calme, j'avais un bon pressentiment. Et, effectivement, à l'arrivée la situation s'est plutôt très bien présentée. 

La nouvelle maitresse était aux petits soins pour nous. L'enclos était vaste, avec de l'herbe verte et notre nouveau poulailler était luxueux, d'autant que nous n'allions le partager qu'avec une autre poule, petite et rigolotte, avec une huppe sur la tête.

D'emblée, c'était sympa ! La maitresse s'asseyait sur un vieux banc et nous venions nous percher près d'elle.

Ma soeur, qui s'est fait baptiser Zoé, à cause, parait-il de "la grande Zoé" (???), aimait se percher en haut du dossier, quasiment sur la tête de la maîtresse. Moi, qui me suis fait appeler Chloé, je préfèrais aller sur ses genoux. Elle me grattait le cou et j'aimais bien car mes plumes étaient encore en train de pousser et cela me démangeait fort.

 

00 jeunes orpis sur vieux banc 1

Ensuite, j'ai eu de la chance !

Pour tenir compagnie à Estia, la poule Padoue, la maîtresse, toujours avec sa fille, avait acheté une autre petite poule huppée. Quand nous sommes arrivé(e)s, elle était à l'isolement et la poule Padoue l'a rejointe, car elles étaient enrhumées.

Au bout d'un mois, l'autre poule s'est trahie. "Elle" s'est mise à pousser des cris bizarres le matin, cris qui sont devenus clairement des cocoricos. J'étais intéressé de voir ce qu'allait déclencher cet "outcoming".

Dans un premier temps, cela s'est plutôt bien passé pour je jeune coq : son nom de Nina est passé à Nino et les Padoues nous ont rejoint. Nino a grandi rapidement et a très vite joué au petit chef, bien que ma soeur Zoé ne s'en soit pas laissée compter.

Pendant ce temps là, l'attention de la maîtresse s'était reportée sur deux nouvelles arrivantes, des poules étranges, sans queue, mais très vivantes et qui causaient tout le temps. J'ai appris que c'étaient des Araucanas et elles se sont vues attribuer les noms d'Edith et de Judith. Drôles de noms pour des poules !

Nous avons bien accueilli Edith et Judith, mais elles ont mis un moment à s'adapter. Elles arrivaient d'un grand élevage dans lequel les habitudes de vie étaient surement très différentes. Enfin, elles aussi, elles ont sauté sur l'herbe verte, à tel point qu'aucun petit brin n'est resté.

Elles aimaient également bien se percher, mais plus haut que le vieux banc, alors le patron a fabriqué des grands perchoirs. Elles taillaient la bavette avec Zoé pendant que je me reposais au soleil ou dans le bac de sable obligeamment fourni par la maîtresse. J'étais toujours bien calme et, surtout, je ne m'approchais pas de l'autre, le petit coq excité qui continuait de coqueliner à tout va.

Je voyais bien que ses cris incessant stressaient la maîtresse et qu'elle n'avait pas apprécié que cet idiot vienne lui piquer l'arrière du pied.

Pendant l'été, ma maîtresse s'est quand même doutée de quelque chose !

J'avais beau me faire discret, je grandissais quand même rapidement. Mes pattes, surtout, devenaient énormes et je ne pouvais pas empêcher ma crête et mes barbillons de pousser un peu. Et puis, le précédent de Nina qui s'était transformée en Nino avait rendu la maîtresse circonspecte. Bref, elle m'examinait souvent d'un air critique et pensif. je savais bien qu'elle allait découvrir "le pot aux roses", enfin si l'on peut employer cette expression en ce qui concerne mon appartenance sexuelle.

Mais, heureusement, toute l'attention a été focalisée sur le cas de Nino qui avait la bêtise de chanter à toute heure du jour et de la nuit.

Nino en plein chant     20130717 114412 1

Un jour, il a été embarqué dans un carton et nous ne l'avons plus revu, mais j'ai bien vu que la maîtresse était ennuyée et avait mauvaise conscience. Je n'ose imaginer ce qui est advenu du copain !

 

 

Du coup, même quand j'ai chanté un peu, le matin seulement et après l'ouverture du poulailler, j'ai senti que, passant derrière Nino, cela allait pouvoir le faire.

Au bout d'un mois, il a été clair que la maîtresse savait qui j'étais puisqu'elle m'appelait Théo et que j'allais pouvoir rester car j'avais eu la chance d'avoir Nino en "faire-valoir". En plus, la chance était encore avec moi : je devenais beau,  mais vraiment beau. Vendu comme une poule noire, je m'étais transformé en superbe coq argenté, couleur assez rare de surcroît chez les Orpingtons !

Tout aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes si un problème de santé n'était pas venu me gâcher la vie.

J'ai été victime de l'incompétence médicale

A l'automne 2013, j'ai commencé à me sentir patraque et à avoir mal à une patte et à boiter. Inquiète, ma maîtresse m'a emmenée chez le médecin pour animaux, un vétérinaire qui annonçait soigner les n.a.c.. Cela aurait dû être adapté puisque ma maîtresse m'a expliqué je suis un nac : nouvel animal de compagnie.

Mais le vétérinaire pour nac, un rigolo, celui-là ! Il m'a examiné, m'a pesé et a déclaré que mon seul problème était d'être trop gros. Selon lui, j'avais mangé trop gras et mon problème de patte était de la goutte. Pourtant, j'étais loin d'être aussi gourmand que les filles que je laissais manger avant moi. Et c'était normal que je sois lourd, j'étais un très grand Orpington, pas un Pékin ! Bref, cet idiot a juste prescrit des vitamines et un régime en facturant une consultation hors de prix à ma maîtresse.

Je voyais bien qu'elle n'avait pas été convaincue elle aussi. Je sais qu'elle a fait pour le mieux mais elle était débutante avec un gallinacé malade et elle a tardé à me mettre sous antibiotique. Résultat, l'infection s'est implantée profondément dans les os de ma patte. J'ai eu plusieurs traitements, dont certains m'ont rendu malade à crever, mais je reste boiteux et j'ai souvent bien mal à ma patte.

Enfin, chacun ses petites misères. A part cela, la vie a été plutôt sympa avec moi. Seul coq, j'étais entouré d'une petite cour de poules qui s'est progressivement élargie à 5, puis à 7 poules. 

Je suis devenu un maître du poulailler respecté et chouchouté.

C'est clair, j'ai été et je suis encore aimé, adoré même, je dirais, par certaines. Et quand je dis certaines,  je pense aux poules, mais aussi aux humaines dont je suis le chouchou. La fille de ma maîtresse ne jure que par moi. Elle est intarrissable sur ma douceur et ma gentillesse.

Parmi les miens, j'ai une copine d'enfance, Zoé, dont je reste proche. On a vécu nos premières aventures ensemble. Mais elle n'a pas tous les jours un caractère facile et, pour cocher, c'est seulement quand elle veut et comme elle est agile, court vite et se perche, je peux toujours m'accrocher !

 

Heureusement, j'ai d'autres amantes plus compréhensives. Parmi les Orpingtons, ma favorite c'est Liserette, une petite poule boulotte qui me suit partout, me regarde avec adoration et est toujours prête à se faire cocher sans faire d'histoires. J'apprécie aussi Estia, la Padoue. C'est un autre genre, plus nerveux. Mais elle est très attentionnée avec moi et vient tous les jours picorer et lisser les plumes de mon camail. Et pour la cocher, c'est facile, elle est beaucoup plus petite que moi et je n'ai pas à sauter.

Les Araucanas aussi sont chouettes. Elles sont aussi faciles à cocher et elles sont très solidaires. Quand je suis patraque, elles viennent à mes côtés et me soutiennent en se mettant sous mes ailes. Mais j'espère qu'elles vont continuer, car elles ne me sont pas très fidèles. 

Ah, oui, il faut que je raconte : je ne suis plus le seul coq du poulailler !

Deux autres coqs partagent ma basse-cour

Le problème avec les poussins, c'est qu'ils grandissent !

Zoé, ma soeur Orpington, et Edith, la plus petite des deux Araucanas, ont eu des bébés et, bien sûr, des poussins mâles. Et puis, la maîtresse et le patron ont rapporté deux poussins de leurs vacances de Pâques en Bretagne,  une fille Araucana et un petit gars avec des grandes plumes aux pattes, un Cochin.

Les poussins ont bien grandi mais nous en avons vu disparaître un bon nombre. Actuellement, il ne reste plus que deux jeunes coqs. Un grand Cochin bleu et un Orpington argenté comme moi (mais en moins beau).

Le petit Orpington, pas de problème. Il fait profil bas, se garde bien de chanter et n'essaie de cocher que les petites Hollandaises huppées, sans aucun succès d'ailleurs. Ce n'est pas parce qu'elles sont petites qu'elles sont des filles faciles. Elles s'enfuient en criant comme si on les égorgeait et viennent se réfugier derrière moi. En revanche, le grand Cochin, Patty qu'il s'appelle, aurait pu devenir un souci.

Petit, il était tout le temps collé à la maîtresse, toujours fourré dans ses pattes en bruitant sans cesse. Maintenant, il se pavane. Il fait comme s' il était le maître en venant à la rencontre de la maîtresse et du patron. 

Patty a l'intelligence de ne pas trop chanter, juste un peu, comme moi et, le plus souvent, avec moi. Mais, il coche et coche même ardemment ! C'est sûr qu'il est jeune et en pleine forme. Il a commencé avec Chouppi, sa petite copine Araucana. Ça, c'était normal, c'est son amie d'enfance et ils sont inséparables. Mais, après,  il a commencé à vouloir cocher les autres Araucanas. Au début, elles ne voulaient pas et venaient derrière moi, mais, maintenant, j'ai bien vu qu'elles commençaient à se laisser faire. Et, d'emblée,  on a partagé l'aînée des jeunes Orpington fauve.

Bon, pour l'instant, cela va encore ! Quand je m'interpose, Patty n'insiste pas. Je craignais que ce soit plus par couardise que par respect vis-à-vis de moi, mais non, nous nous entendons bien et nous nous reposons volontiers ensemble, l'un à côté de l'autre. Mais je ne sais pas si tout continuera aussi bien au printemps.

En plus, les poules ne sont pas trop rassurées, il peut faire peur !

Mes appréhensions pour l'avenir n'étaient pas fondées

Patty est déjà quand même bien effronté de venir attendre mes poules à la sortie de mon poulailler. Il ne ferait pas cela si je n'étais pas freiné par ma patte pour sortir. Et, à propos de sortie, c'est chouette de pouvoir circuler en liberté dans le jardin, mais cela lui donne un sacré avantage.  Il peut suivre les filles partout, lui ! Enfin, presque partout, parce que les Hollandaises se faufilent dans des endroits pas possibles et les Araucanas grimpent et se perchent. Il n'a pas de problème de patte, mais il a le cul lourd (lol).

Et finalement, je m'entends bien avec Patty. Il me respecte et ne vient pas cocher les poules qui sont près de moi. C'est plus simple avec lui qu'avec le jeune Atos, un Orpington tout fou qui saute sur toutes les poules si on ne s'interpose pas. Il a bien abîmé le dos des poules et je vois bien que cela préoccupe la maîtresse qui l'enferme dans un enclos séparé pour qu'on ait un peu la paix.

Dernière nouvelle ! Atos est parti à la campagne ! Il paraît qu'il est maintenant un coq champennois et qu'il a été renommé Hermès. Bon vent !

 

Je demeure le favori de toutes ces dames et me fais bien chouchouter

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Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

Commentaires

  • Mathieu333
    J'ai beaucoup aimé le récit de la vie de Chloe, pardon, Théo ! Amusant le passage sur l'outcoming ! Ces récits me donnent des idées pour mon propre site. Merci du partage !
  • Graciane
    Oui, il s'est bien amélioré depuis l'année dernière. Il a toujours plein de défauts par rapport aux standards officiels d'un Orpington argenté, mais il a un gabarit majestueux. Même s'il n'a pas vraiment de liserés, son plumage est bien plus beau que l'année dernière. Il est surtout en bien meilleure forme ! Même s'il a un peu mal à sa patte quand il fait très froid, le problème semble bien s'être stabilisé et il vit avec. Il n'a pas été malade pour l'instant. c'est quand même un soulagement après les difficultés de l'hiver dernier !
  • Stéphanie
    • 3. Stéphanie Le 11/02/2015
    Superbes, ces photos ! Tu as bien fait de réactualiser le portrait de Théo, il devient de plus en plus beau ! c'est une idée ou bien son plumage s'est amélioré depuis sa mue ?
  • Roberto
    Sympa, la vie du coq Théo ! J'aime bien vos petits récits et les portraits personnalisés.
    On a l'impression de mieux connaître Théo et cela rend ses photos plus intéressantes à regarder !
  • Graciane
    Oui, il faut qu'on y réfléchisse, d'autant que je ne résisterai pas à faire couver certains des oeufs de l'élevage.
    Il faudra que je sépare au moins les Orpingtons des Cochins.
    Comme je n'ai pas de coq Araucana, les Araucanas pourront aller avec Patty. Elles sont costaudes et ne semblent pas impressionnées par lui.
    Et les petites, il est évident qu'il faudra les mettre à l'abri avec Théo, sinon Patty risque des les affoler ou de les écraser.
  • Didine
    Théo est vraiment le meilleur ! C'est sans doute une bonne idée de prévoir de séparer ton petit troupeau au printemps. Je trouve que Patty est moins doux que Théo. Ce serait mieux de laisser avec Théo ses anciennes poules et surtout les petites.

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